[Argentina] Jorge Olivera, responsable de l’enlèvement de Marie-Anne Erize, en cavale

Le 5 juillet 2013, Jorge Antonio Olivera, responsable de la disparition de la franco-argentine Marie-Anne Erize, est condamné pour ses actes lors de la dernière dictature militaire, à la prison à perpétuité.

Le 25 juillet, il est conduit, avec un de ses camarades accusé, à l’hôpital militaire central Cosme Argerich pour des raisons médicales floues. L’autorisation de son transfert depuis le centre pénitentiaire a été appuyé par la psychologue Marta Ravasi, sa femme.
L’évasion pensée par Olivera se révélera être une réussite car il est encore aujourd’hui en cavale. Mais rien n’aurait pu se faire sans ses collaborateurs, membres du pouvoir judiciaire, des forces armées, du service pénitentiaire fédéral et du corps médical.
Les deux hommes sont aujourd’hui introuvables, une récompense de 2 millions de pesos est mise en jeu pour chacun d’entre eux.

Le 15 octobre 1976 à midi, alors qu’elle venait faire réparer son vélo, Marie-Anne Erize fut la proie d’un enlèvement. Un inconnu en civil l’aborda et finit par la pousser agressivement à l’arrière d’une Ford Falcon, marque de fabrique des patotas (groupes paramilitaires) lors de la dictature, avec l’aide de deux autres agresseurs. Ce fut la dernière fois que la jeune femme fut aperçue. Depuis peu, elle s’était réfugiée àSan Juan, petite ville du nord-ouest de l’Argentine. La dictature militaire l’avait contrainte à fuir Buenos Aires, devenue alors trop dangereuse pour elle.

La jeune femme d’origine française naquit en 1952 et grandit dans la province de Missiones. Adolescente, elle s’installera avec sa famille à Buenos Aires. À 19 ans, elle jonglera entre différents mondes : celui de la mode, où elle débutera une carrière de mannequinat, et celui de l’action sociale à la villa (Bidonville argentin) Bajo Belgrano.
Deux ans plus tard, elle s’oriente vers une carrière de journaliste et de ce fait s’inscrit à l’Université de Buenos Aires dans la filière anthropologie. Nous sommes en 1973, comme beaucoup de jeunes de gauche, Marie-Anne attends avec impatience le retour de l’ancien président éxilé, Juan Domingo Perón.
Très proche encore des habitants de la villa Bajo Belgrano, elle se rend avec eux à un événement tant attendu : l’arrivée de Perón à l’aéroport d’Ezeiza, le mercredi 20 juin 1973. Toutes la gauche argentine y est rassemblée. Mais le « vieux », comme on l’appelle, a bien changé lors de son exil en Europe aux côtés de Franco et d’autres fascistes en vogue sur le vieux continent. Les cris de joies sont bientôt remplacés par ceux de terreur et de douleur. Perón ordonnera à l’aile droite péroniste de tirer sur les « gauchistes » présents. Un véritable massacre eu alors lieu.
Comme beaucoup, Marie-Anne se sentira trahie par cette homme qui leur avait promis la révolution. Et par le biais de son compagnon de l’époque elle rejoindra la guérilla, le groupe des Montoneros.

L’ancien militaire Jorge Olivera s’est bien reconverti à la sortie de la dictature : Il ne s’agit plus de torturer et de commanditer des enlèvements mais de défendre ceux qui ont agit ainsi. Il est alors avocat et dément toute inculpation concernant son implication dans la disparition de Marie- Anne Erize. Comme toute pourriture qu’il a pu être et qu’il est encore, il n’a eu aucun scrupule lors de la défense de personnages tels que le général  Guillermo Suárez Mason (commandant lors de la dictature du 1er corps de l’armée argentine et ayant ainsi le pouvoir décisionnel des agissements dans les centres de détention clandestins Automotores Orletti, Pozo de Banfield, La Cacha et Olimpo), l’Amiral Emilio Eduardo Massera (un des dirigeants de la junte) ou Erich Priebke (Hauptsturmführer de la SS  à Rome).

En 2000, alors qu’il s’apprêtait à savourer une seconde lune de miel en Italie avec sa femme, il fut arrêté par Interpol sous la demande du juge français Roger Le Loire pour la disparition de Marie-Anne Erize.
Sa défense en Italie fut assurée par l’avocat néofasciste Augusto Sinagra, défenseur également de Licio Gelli, grand maître de la Loge P-2, dont les anciens membres n’étaient autres que Guillermo Suárez Mason, Emilio Eduardo Massera et Sinagra lui même.
Avec l’aide de l’armée Olivera obtint après 42 jours d’enfermement, sa liberté.

En 2007, le juge fédéral de San Juan, Leopoldo Rago Gallo, ordonna la détention d’officiers et sous-officiers dont Olivera pour les tortures commises à l’encontre de l’actuelle juge Margarita Camus. Furent alors arrêtés Osvaldo Benito Martel et Alejandro Víctor Lazo. Mais Olivera y Vic passèrent à la clandestinité.
Durant un an Olivera, se prélassa tranquillement à Vicente López en compagnie de sa femme dans un somptueux chalet.
Le 3 novembre 2008, une brigade de la Police Fédérale l’arrêta malgré une tentative de fuite du bourreau.

On sait aujourd’hui que l’enlèvement de Marie-Anne Erize fut dirigée par Olivera accompagné des officiers Eduardo Bic et Eduardo Daniel Cardozo. Il emmenèrent alors la jeune femme au centre clandestin de détention « La Marquesita » où Olivera et Cadozo se disputèrent entre eux le droit de violer la détenue. Ils l’assassinèrent peu après.

Comment de telles ordures peuvent encore échapper à une justice, déjà trop douce pour eux, avec la complicité des institutions ?
Pourquoi réclamer justice alors que c’est elle-même qui l’aide à s’évader ?
Reprenons en main une vraie justice populaire et auto-organisée et appliquons la nous-même ! Continue reading

[Argentina] Déclaration de la FORA-AIT sur le 24 mars : Le jour de la mémoire, de la vérité et de la justice

24-de-marzo

On a l’impression qu’ils choisissent le nom des jours fériés en fonction de se que ne fera jamais l’État, ce jour devrait en réalité s’appeler : «jour de l’oubli, du mensonge et de l’injustice». Si en réalité nous avions de la mémoire, nous nous rappellerions combien d’ouvriers furent disparus, torturés et assassinés, et qui furent livrés par les bureaucraties syndicales à la dictature actuelle ; nous nous rappellerions combien de politiciens actuellement présents, furent fonctionnaires à cette époque approuvant ce qu’aujourd’hui ils critiquent ; nous nous rappellerions combien de journaux soutenaient la junte militaire alors qu’aujourd’hui ils la condamnent ; ou combien de chefs d’entreprise, aujourd’hui démocrates, se sont enrichis avec les militaires en signant des contrats et des projets qui leur laissaient la voie libre pour la flexibilité salariale et les contrats précaires
poubelles dans le texte, ndt dont nous souffrons maintenant. Si nous avions de la mémoire, nous nous rappellerions que tous les gouvernements et moyens de communication, occultèrent la vérité et transgressèrent la justice. Les intérêts que tous les secteurs, du pouvoir défendus lors de la dictature, sont les mêmes intérêts défendus aujourd’hui avec un peu près les mêmes méthodes. Tant en démocratie qu’en dictature, la répression est importante, et de fait, ce fut le ciment du pays, et tous les gouvernements suivants ont continué avec cette incontournable politique d’État. Le fait que la dernière dictature militaire ait tenu un registre écrit de procédés à adopter avant chaque acte de répression, comme les dossiers des détenus, leurs accusations et condamnations, montre que les militaires n’ont pas agit comme des imbéciles, ni individuellement cachés, mais qu’ils répondaient à une raison de l’État nécessaire pour maintenir le système capitaliste qui était alors en crise. Tous les gouvernements ont choisi la répression, qu’elle soit militaire, policière, syndicale, religieuse, etc, notre pain quotidien, car il est le seul moyen efficace de maintenir un système basé sur l’exploitation et l’injustice.
Aujourd’hui, les disparus ou assassinés par une gâchette facile sont monnaie courante, l’intervention de militaires aux portes des usines où il y a des protestations, des voyous et des bandes organisées syndicales qui se sont arrangées avec la police, non pas uniquement pour le football, mais aussi pour leurs affaires supplémentaires intimidation des travailleurs grévistes.
La détention arbitraire de dizaines de personnes lors d’une manifestation ne nous surprend plus ou la mort d’un activiste social, ou les suicides dans les prisons ne surprennent plus les détenus, le tabassage à tabac lors d’expulsions, ou la protestation contre les entreprises polluantes qui détruisent le sol et l’air, si bien que nous ne sommes plus surpris face à la fonction première de l’État qui est de réprimer et cela continue même à sembler logique dans ce monde capitaliste et démocratique, voilà pourquoi nous n’arrêterons pas de répudier ces actes qui paraissent tant normaux et nous nous organisons pour le combattre. Ce jour férié, n’est autre que la cooptation, du gouvernement, d’une lutte sociale axée sur la vengeance contre les militaires de cette époque. Parce que nous savons très bien que les condamnations et les procès ne rendront pas justice. Pour plus que les militaires ne profitent plus de l’emprisonnement à domicile et soit transférés dans des prisons ordinaires, pour plus qu’ils continuent à être condamnés judiciairement, et cette lutte des enfants ou parents des disparus est totalement légitime, la véritable justice ne peut pas venir des personnes qui approuvent la répression actuelle, comme ceux de la Cour Suprême, ni d’un système créé grâce à cette dictature. Aujourd’hui ces militaires sont «jetables» et les condamner est utile pour le gouvernement en place car ils utilisent politiquement cette situation, et s’autodésigne comme le gouvernement des Droits de l’Homme, quant en réalité l’utilisation des forces policières sont à l’ordre du jour contre les secteurs sociaux en lutte, que ce soit les ouvriers, les étudiants, les paysans, .. etc. D’autant plus que le gouvernement veut redorer l’image de l’État avec cet écran anti-dictature, nous savons que le plan des dictatures en Amérique, a été le coup d’envoi pour instaurer sur tout le continent ces gouvernements démocratiques que nous avons aujourd’hui, et qu’ils font toujours subir les plus grandes humiliations envers les ouvriers, sans être dénoncés.
Toutes les injustices sociales et salariales actuelles comme le travail au noir, les bas salaires, la hausse des prix, l’impôt sur le revenu, la dictature syndicale de la CGT, les entreprises intérimaires, la répression policière dans les quartiers, les mégas entreprises minières, la déforestation, etc, sont les produits des dictatures militaires, pas seulement de celle des années 70, mais aussi les antérieures comme celle de Perón ou de Uriburu, ou de celle des gouvernements démocratiques antérieures qui déportaient et assassinaient les ouvriers pour maintenir la paix capitaliste. L’accomplissement et la conquête des nouveaux droits sont exclusivement à la responsabilité des travailleurs, nous devons nous organiser sans dirigeants et sans partis politiques, et sans rien espérer des gouvernements mis à part de la répression et quelques autres miettes pour que nous les votions et nous nous calmons.
Du point de vue de la Federación Obrera Regional Argentina
FORA : Fédération Ouvrière Régionale Argentine., nous voulons profiter de ce jour pour continuer à dénoncer la répression actuelle du gouvernement hypocrite, déclarant que ces jours fériés ne sont pas des jours de fêtes, mais des jours de lutte.
Cependant, nous sommes conscients que la lutte contre l’État et le capitalisme doit se faire tous les jours en faisant sérieusement la promotion de la mémoire, pour que nous puissions comprendre les vérités qui circulent, et que nous puissions apprendre de nos erreurs et rendre une véritable justice. L’unique manière de l’obtenir est de s’organiser et combattre chaque jour les injustices sociales, tant dans le domaine du travail que dans la rue avec nos pairs, privilégiant la solidarité, le soutien mutuel, l’égalité et la liberté, qui sont des valeurs que ce système ne connaît pas et qui sont nécessaires pour forger un monde nouveau.

Sociedad de Resistencia Oficios Varios Capital, adherida a la FORA-AIT

[Argentina] Le 24 mars 1976, la guerre d’Algérie bis

videla justicia

Le 24 mars 1976, trois ans après le retour de Juan Domingo Perón et un an après sa mort, une nouvelle fait de nouveau tressaillir les argentins, un coup d’état vient d’avoir lieu. Le premier communiqué de la junte militaire sera celui-ci :

«  Nous communiquons à la population que, à partir de cette date, le pays est sous le contrôle opérationnel de la Junte des Commandants Généraux des Forces Armées. Il est recommandé à tous les habitants le respect strict des dispositions et directives émanant des autorités militaires, de sécurité ou policières, et une attention extrême afin d’éviter toutes actions et attitudes individuelles ou de groupe qui pourraient exiger une intervention drastique du personnel des opérations. Signé : Général Jorge Rafael Videla, Amiral Emilio Eduardo Massera et Brigadier Orlando Ramón Agosti. »

À cette date, et pour les sept ans à venir, les argentins connurent une guerre sale ayant laissée derrière elle 30 000 disparus. Le Processus de Réorganisation Nationale était appliqué sans pitié pour « vaincre la subversion » allant jusqu’à s’attaquer à des enfants.1

L’installation de cette junte et son fonctionnement sont le résultat d’une implication mondiale. Bien entendu, La Doctrine de Sécurité Nationale, créée par le président nord-américain Harry Truman, en 1947 à la suite de la Guerre Froide, « justifiait pleinement » la présence des États-Unis ; car comme cette dernière spécifiait l’empire américain devaient intervenir militairement dans les pays perturbés par l’avancée communiste, car ils constituaient une agression à la sécurité nationale. Les pays latino-américains durent adhérer à cette doctrine afin de ne pas compromettre leur amitié avec les États-Unis qui jugeaient leur neutralité comme immorale.

Mais, ce ne furent pas les seuls marionnettistes, d’autres plus discrets et moins habitués à agir sur le continent américain aidèrent allègrement la junte à se mettre en place. Les premiers actes d’application de la doctrine étasunienne fut la création au Brésil à l’aube de l’avènement du dictateur Castelo Branco, du service national d’information et l’ouverture de l’École Militaire des Amériques.

L’institution forma jusqu’en 2001 plus de 61 000 militaires en technique de contre-guérilla, tortures et interrogatoires. Parmi les élèves, le nicaraguayen Roberto D’Aubuisson, les panaméens Manuel Noriega et Omar Torrijos, le bolivien Hugo Banzer, le péruvien Vladimiro Montesinos, les généraux argentins Roberto Marcelo Levingston, Leopoldo Galtieri, l’amiral Emilio Eduardo Massera ou encore les officiers d’Augusto Pinochet.

Les méthodes de torture y ont été enseignées par des militaires français, vétérans des guerres d’Indochine et d’Algérie, comme Paul Aussaresses et Roger Trinquier. Le théologien Joseph Comblin affirmera et confirmera le rôle majeurs de ces serviteurs de l’hexagone :

« En Argentine, la stratégie de la guerre contre-révolutionnaire est venue directement de France. C’est pourquoi l’armée argentine a adopté la théorie du front interne et des frontières idéologiques, ainsi que la pratique de la guerre contre la subversion, avant même que les Américains ne l’aient mise au point. Dès 1959, tout cela fait partie de la doctrine militaire argentine : d’une certaine façon, la doctrine américaine de la sécurité nationale n’était plus nécessaire, parce qu’on avait déjà son équivalent importé de France. Mais par ailleurs, cette importation française constituait une excellente introduction : les mentalités étaient déjà prêtes. »2

Les élèves de l’École Militaire des Amériques s’applique depuis à reproduire un schéma stratégique similaire à la guerre d’Algérie : La quadrillage du territoire, les méthodes interrogatoires psychologiques et physiques (en argentine la gégène est appelée la picana), les vols de la mort (ou Crevettes Bigeard en Algérie, le détenu est sédaté et jeté vivant hors d’hélicoptère ou avion se situant à plusieurs kilomètres au dessus de la mer), l’élimination des réseaux subversifs, …

Néanmoins, les premières applications de la doctrine française en Argentine peuvent être remarquée dès 1957 avec l’arrivée du général Robert Bentresque, recruté par l’État-major argentin avec le soutien de l’ambassade française. Précédé par les colonels Patruce de Naurois et Pierre Badie, ils réaliseront ensemble un travail de préparation idéologique à la doctrine de la guerre contre-révolutionnaire auprès de cadres de l’armée.

En pleine guerre d’Algérie, les français expérimentent alors de nouvelles méthodes visant à la destruction de tout subversifs menaçant le bon déroulement du conflit et sa victoire, puis les transmettent aux demandeurs du continent américain.

Les commandos Delta en Algérie furent les premiers initiateurs de ces nouvelle méthodes d’extermination (un commando séquestre la personne visée a son domicile. Cette dernière est assassinée directement ou enlevée pour être torturée, interrogée puis liquidée. Son corps sera déposé quelques jours plus tard sur un terrain vague). Cet enseignement formera les futurs escadrons de la mort argentins par le biais du film La Bataille d’Alger de Gillo Pontecorvo qui expose la lutte pour le contrôle de la Casbah entre militants du FLN et les parachutistes français. Comble de l’ironie, ce témoignage cinématographique se voulait critique envers le gouvernement français et s’est d’ailleurs vu interdit dans l’hexagone.

À la suite de la guerre d’Algérie de nombreux acteurs français accusés pour crime contre l’humanité se sont exilés au Chili et en Argentine. Aujourd’hui date funeste d’anniversaire de ce coup d’État, continuons à combattre les systèmes fascistes, les responsable de ces derniers sans oublier les acteurs dans l’ombre. L’histoire française occulte généralement volontiers certaines pages… Les guerres d’Indochine et d’Algérie encore taboues, la collaboration avec les nord et sud-américains pour la diffusion massive de leur doctrine. La doctrine française, ouvrage de Trinquier partant de constatation en Indochine puis mis en application prototype en Algérie, est sûrement la stratégie de guerre la plus utilisée au monde aujourd’hui.

N’oublions pas l’implication du gouvernement français, n’oublions pas les horreurs commises !!!

N’oublions pas le système répressif des argentins sur leur population !!!

sources :

COMBLIN Joseph, Le pouvoir militaire en Amérique latine, Ed. Delarge, Paris, 1977, 242 p.

ROBIN Marie-Monique, Escadrons de la mort, l’École française, La Découverte, Paris, 2004, 453 p.

1Voir article İ Nunca más la noche de los lápices !

2 COMBLIN Joseph, Le pouvoir militaire en Amérique latine, Ed. Delarge, Paris, 1977, p.146.

[Argentina] ¿ Nunca Más ? Ce qu’en pense la nouvelle coqueluche du Vatican…

Alors que le Vatican se réjouit de l’élection de son nouveau dirigeant, le monde entier (ou presque) s’interroge non pas sur l’utilité d’un tout puissant pantin religieux, mais sur son passé. Tout comme Benoît XVI fut accusé d’avoir été le fruit des jeunesses hitlériennes, François Ier, lui, d’avoir collaboré pendant la dictature argentine au vol de bébés des disparu.e.s.

De là s’en suit, bien-entendu, un débat entre les pro et les anti, les spécialistes et les prix Nobel, entre autres.

Certes, il ne faut sûrement pas laisser un fasciste être au pouvoir… Mais au pouvoir de quoi ? Au pouvoir d’une institution qui sans aucun doute est le miroir même de la haine, l’endoctrinement violent, la terreur, la cause des plus grands génocides de tous les temps….

Bref la peste !

Alors à quoi bon ? A quoi bon s’étonner ? A quoi bon polémiquer sur la légitimité du rang ?

Un fasciste à sa place ! Ce n’est que là l’ordre des choses après tout !

Peut-être faudrait-il se remémorer les atroces événements qui ont mené au vol des enfants pendant la dictature argentine et le rôle du clergé en général…

L’Église argentine durant la dictature a souvent collaboré avec les militaires, certains de ses membres ont également été livré par elle-même à des centres de détention clandestins, en particulier ceux qui œuvraient dans les villas miserias1.

De nature conservatrice l’institution religieuse argentine n’a jamais entrepris un quelconque travail de mémoire concernant cette époque, elle ne s’est jamais repentie non plus du rôle que ses membres ont joué sous le régime totalitaire.

L’affaire des bébés volés, et le travail que fournissent las abuelas de la Plaza de Mayo, est loin d’être achevé.

Lors de l’enlèvement des «subversifs» durant la dernière dictature (1976-1983), certaines femmes étaient enceintes et durent donner la vie dans les camps de concentration.

Les nouveaux nés restaient généralement une quinzaine de jour auprès de leur mère avant d’être adoptés par des familles de militaires. Le régime totalitaire considérait que la subversion était héréditaire et donc qu’elle se transmettait par lien familial. Suivant ce raisonnement, les fils de captifs devaient alors, pour pallier à cela, perdre intégralement leur identité.

Las abuelas ont entamés un long processus de recherche de ces bébés volés. Aujourd’hui plus d’une centaine de cas ont été résolu, grâce à la banque de données génétiques. Les recherches s’effectuent à l’aide de leur ADN en comparaison avec celle des potentiels enfants enlevés. Les résultats de filiation par lien dit d »abuelidad »2 sont possible aujourd’hui à 99,99 %. Malheureusement les enquêtes ne sont pas toujours aussi simples et il reste énormément de cas non-résolu, on estime a 500, le nombre de bébés volés.

Alors, faut-il polémiquer sur un rapport direct ou indirect d’implication de Bergoglio, ou faut-il faire face à l’ennemi commun qu’est la religion, son endoctrinement et sa participation active auprès de régimes totalitaires ?

Aucun Homme est inconscient des actes de son institution lorsqu’il occupe une telle place. Occuper cette place, c’est cautionner… Surtout lorsqu’il s’agit du rôle voulant perpétuer traditionnellement l’endoctrinement mondial.

1 Bidonvilles de Buenos Aires

2 Nom donné de par les recherches menées par las abuelas (grand-mères)

[Argentina] ¿ y Julio ?

Le 18 septembre 2006, après trente ans d’impunité pour les responsables de la dictature militaire argentine, Jorge Julio López est appelé comme témoin au procès de Miguel Etchecolatz.

Le témoignage qu’apportera Julio permettra d’inculper 62 militaires et policiers mais aussi Miguel Etchecolatz à une condamnation à perpétuité pour crimes contre l’humanité.

Rapellons que Julio avait été une victime de cette dictature (1976-1983) qui enfermait dans des centres de détentions clandestins ses « opposants ». Au total 30 000 personnes portées disparues, tortutées et tuées dans ces camps de la mort.

Julio, lui, a été séquestré illégalement le 21 octobre 1976 et remis en liberté le 25 juin 1979. 

Durant ces années là, Miguel Etchecolatz était directeur des enquêtes de la province de Buenos Aires, en charge de centres de détention mais il était aussi le bras droit du Général Ramón Camps.

Ce dernier dirigait la Police de la province de Buenos Aires. Il fut l’un des principaux bourreaux antisémites de la dictature (en particulier lors de l’arrestation de Jacobo Timerman) et le responsable de rafles comme La Noche de los Lápices (voir article précédent).

Depuis le 18 septembre 2006, les hypothèses quant à la disparition de Julio sont nombreuses mais aucune n’a pu être démontrée. 

Le 8 janvier 2007, la députée Nora Ginzburg a présenté un projet de loi spécifiant dans son premier article la création d’ : « une commission bicamérale spéciale destinée à maintenir informé le Congrès de la Nation du déroulement de l’enquête concernant l’enlèvement de Monsieur Jorge Julio López”.

Ce projet n’avançant pas, elle présenta le 15 février de la même année, un autre projet visant à commander un rapport dirigé par le Pouvoir Executif en place (A savoir le gouvernement de Néstor Kirchner). Cette proposition avorta elle aussi.

Nora Ginzburg insista, le 27 février, auprès de la Chambre des Députés pour la mise en place de son premier projet. Le président de la Chambre, Alberto Ballestrini, refusa sa demande. L’ensemble du Pouvoir Executif finit par voter la proposition. Elle fut rejetée 118 voix contre 47 (Tous les députés du Frente para la Victoria et du Peronismo Federal votèrent contre).

Dimanche dernier, à deux jours du funeste anniversaire de la disparition de son père, Rubén López à accepter de répondre à une interview dans le journal argentin La Nación : “ Après six ans nous n’avons rien, ni une preuve, ni un suspect, seulement une lutte et de l’impuissance, ce sont six ans sans réponses de la part de la justice, six ans que nous ne savons rien de rien”.

Il continuera par faire part des “initiatives” prises par les autorités : “En six ans la justice ne nous a donné aucune réponse. L’autre jour, ils m’ont sorti que des moyens avaient été mis place pour surveiller les appels téléphoniques passés de 50 000 portables depuis le 18 septembre 2006. En réalité, cela fait deux ans qu’ils changent de discours : d’abord ils ont attrapé un policier, après un autre policier mais celui là était des fédéraux, maintenant, je sais pas ce qu’il se passe mais ils ne nous disent plus rien […] Aujourd’hui, ils parlent d’analyser les appels passés le premier jour. Ca paraît un peu incroyale, mais bon, c’est ce qu’il se passe”.

Puis quand le journaliste lui parle du gouvernement Kirchner, il répond : “ Dans un premier temps, nous avons eu une réunion avec Néstor Kirchner quand il était président, et il paraissait se sentir concerné. En plus, il avait dit publiquement que “le camarade López avait été enlevé par les mêmes que l’on connaissait”. A ce moment, nous avons senti que le gouvernement était du côté de notre famille. Puis, nous sommes revenu le voir et je lui ai demandé si la promesse qu’il nous avait faites à la première réunion, d’éclaircir l’affaire et de continuer de soutenir la famille, serait respectée de la même manière par la présidente de la nation (ndt : à savoir que l’actuelle présidente est Cristina Kirchner, l’épouse de Néstor Kirchner), et il m’a dit que oui.”.

Mais la réalité est plus dure que les douces paroles du gouvernement. Aujourd’hui personne ne fait rien et Cristina Kirchner n’a aucune fois mentionné cette affaire publiquement. Les proches sont désemparés et alors que la soit-disante volonté du gouvernement est de rendre justice aux victimes de la junte, rien n’est fait, rien n’est assumé !

la dictature est encore belle et bien présente !

[Argentina] İ Nunca más la noche de los lápices !

 

Le 24 mars 1976, Isabel Perón et son gouvernement sont renversés par un putsch organisé par les forces militaires argentines. Le général Videla décide alors d’appliquer les premières mesures du Processus de Réorganisation Nationale, objectif du nouveau gouvernement.

Ainsi, sont appliquées : la suppression des activités politiques, la suppression des droits des travailleurs, le contrôle des syndicats, dont la CGT (contrôle qui aboutira à leur dissolution), l’interdiction des grèves, la dissolution du Congrès et des partis politiques, la destitution de la Cour Suprême de Justice de la Nation, la fermeture de certains lieux de réunions nocturne (bars, discothèques,…), l’interdiction de diffusion de certains livres et publications et enfin la censure de la presse.

D’après le Processus, ce serait dans la jeunesse que résiderait tout le potentiel d’une nation. De ce fait, il leur paraissait impératif d’éduquer ce qui deviendra l’élite. Pour ce faire s’en sont suivi de nouvelles réformes vis à vis des établissements secondaires et universitaires.

Cependant, dans les années 70, de nombreux jeunes furent sensibilisés à des questions politiques, généralement d’extrême gauche. Ce qui poussa la junte à mettre en place une surveillance accrue de cette partie de la population, la privant de liberté.

Certains jeunes choisirent le chemin de la guérilla pour se rebeller contre le pouvoir en place. Ces derniers ne furent pas épargnés par le terrorisme de l’État argentin qui, parmi les disparus séquestrés dans des centres de détention clandestins, comptait 70% de jeunes entre 16 et 30 ans.

Près de 250 adolescents, entre 13 et 18 ans, disparurent durant la dernière dictature militaire argentine.

La plus grande opération « rafle » se déroula il y a tout juste 36 ans, le 16 septembre 1976 entre minuit et cinq heures du matin, et est connue sous le nom de « la noche de los lápices ». Au total dix adolescents furent séquestrés cette nuit là.

Parmi les adolescents militants se trouvaient Francisco López Muntaner et María Claudia Falcone tous deux âgés de 15 ans et étudiants au lycée des Beaux Arts de La Plata; Claudio de Acha et Horacio Ángel Úngaro âgés de 16 ans; Daniel Aberto Racero, María Clara Ciocchini et Pablo Alejandro Díaz âgés de 17 ans, qui lui fut séquestré le 21 septembre et sera l’unique survivant à cette rafle.

Tous appartenaient, à l’exception de Pablo qui militait chez les guévaristes, à l’UES (Unión de Estudiantes Secundarios: Union des Étudiants du Secondaire. Mouvement syndical péroniste) développant les mêmes intérêts politiques mais aussi exerçant les mêmes actions militantes comme l’enseignement de l’écriture et de la lecture dans les bidonvilles.

Ainsi, ils sont portés disparus depuis cette nuit où ils furent incarcérés puis transférés dans les centres de détentions Arana, Pozo de Bánfield, Pozo de Quilmes, Jefatura de Policía de la Provincia de Buenos Aires et les commissariats 5°, 8° et 9° de La Plata et le 3° de Valentín Alsina de Lanús et le Polígono de Tiro de Buenos Aires.

Ces adolescents y étaient traités comme des adultes, sans traitement de faveur. Ils subirent les mêmes tortures, humiliations et abus sexuels.

Hier, leur mémoire a été célébrée dans diverses villes argentines. Malheureusement, cette commémoration a été encore une fois récupérée par les médias et la politique afin de faire passer une nouvelle loi (droit de vote à partir de 16 ans). Qu’importe la nécessité de celle ci, un événement et une commémoration ne devraient en aucun cas être utilisés à des fins intéressées !

Un seul refrain devrait être scandé en chœur : «  İ Nunca más ! »