[Colombia] Le terrorisme d’État et l’impunité : le Général Velandia n’est toujours inquiété.

À la veille de l’Examen Périodique Universel sur la situation des droits de l’Homme en Colombie, Le Conseil de l’État a honteusement annulé la destitution du Général Álvaro Velandia Hurtado, responsable de la disparition forcée de Nydia Erika Bautista.

La jeune femme, alors âgée de 30 ans, était membre du groupe guérillero M-191, qui contrairement à d’autres organisations colombiennes et se rapprochant des Tupamaros2 uruguayens, défendant l’idée de combats urbains plutôt que dans la jungle. L’organisation fait son apparition en 1974, l’une des ses premières actions, qui eut lieu la même année, fut le vol de l’épée de Simón Bolívar. Ils déclarèrent lors de la revendication de l’acte : «  Bolívar, ton épée retourne à la lutte »3.

En 1982, alors que Belisario Betancur Cuarta est Président de la République Colombienne, le M-19, l’accuse personnellement de ne pas œuvrer pour la paix au sein du territoire colombien et demande qu’il soit jugé.

Le 5 novembre 1985, suite à de nombreuses négociations entre le gouvernement et les guérilleros, le groupe décidera la prise du palais de justice de Bogotá, prenant ainsi en otage 350 personnes, dont onze des vingt-cinq juges de la cour suprême.

Fidèle à sa délicatesse, l’armée colombienne donnera l’assaut, le lendemain, provoquant une fusillade où 100 otages perdront la vie. Une dizaine de personnes seront évacuées par l’armée vers une école militaire pour un « débriefing ». Ces personnes ne donneront plus signe de vie par la suite et leurs corps ne seront pas retrouvés sauf pour l’une d’entre elles qui se trouvait parmi les corps calcinés à l’intérieur du tribunal. Étrange affaire qui impliquerait que le cadavre aurait été ramené par la suite au sein du palais de justice, et qui sous-entend et laisse imaginer le caractère sale de ce « débriefing ». Tous les guérilleros auraient-été tué sauf deux d’entre eux, dont l’un disparaîtra les jours suivants la prise du palais.

Du point de vue de l’organisation de défense du territoire, l’armée met en place une nouveau Bataillon spécial, le BINCI4 ou XXème Brigade, dirigé par le Brigadier Général Ricardo Charry Solano. Cette escouade paramilitaire a été directement impliquée dans la création de la Triple A (Alliance Américaine Anticommuniste) en 1979, selon un rapport de 1979 de l’ambassade des États-Unis à Bogotá. Le rapport décrit un plan destiné à «créer l’impression que l’Alliance Américaine Anticommuniste s’est elle-même mise en place en Colombie et se prépare à recourir à des actes violents contre les communistes locaux.»

Le BINCI a été accusé de sa participation à de nombreux actes de terrorisme : attentats à la bombe, kidnappings, assassinats contre des militants de gauche et abus contre des prisonniers issus de la guérilla.

La disparition forcée de Nydia Erika Bautista fait partie de ces nombres actes terroristes. Le 30 Août 1987, la jeune femme est enlevée à son domicile et jetée de force dans un véhicule par un groupe issu du BINCI. Malheureusement, ce n’est pas la première fois que Nydia Erika passera par les mains de l’État : elle avait déjà été auparavant victime d’une arrestation en raison de sa participation active au sein du M-19.

Son corps sera retrouvé, trois ans plus tard, laissant apparaître des marques de tortures et d’abus sexuels mais aussi révélant le mode d’exécution adopté : Une balle dans la tête. Elle avaient été classé jusqu’à ce jour comme N.N (sans nom)

Le 9 Juillet 1995, le Procureur délégué de la Colombie pour les droits de l’Homme, Hernando Valencia Villa, a annoncé les conclusions d’une enquête disciplinaire concernant le meurtre et les tortures infligées à Nydia Erika : le Brigadier Général Álvaro Hernán Velandia Hurtado et un sergent de l’armée devront être expulsés des forces armées.

C’est cette même décision qui aujourd’hui n’est toujours pas appliqué à l’encontre de ces fascistes. Une impunité qui est profitable pour tous les initiateurs de crimes similaires à l’encontre de jeunes militants, qui continuent à se la couler douce.

Comment le peuple peut-il trouver la paix alors que les dirigeants pratiquent un terrorisme impuni ?

La lutte doit continuer ! Justice sociale !

Sources :

http://www.anarkismo.net/article/25428

http://www.nydia-erika-bautista.org/

Political Murder and Reform in Reform in Colombia: The Violence Continues, Human Rights Watch, 1992 – 118 pages

 

 

1Movimiento del 19 Abril.

2Les Tupamaros sont un mouvement politique uruguayen, d’extrême-gauche, qui prôna l’action directe et la guérilla urbaine dans les années 1960 et 1970.

3 « Bolívar, tu espada vuelve a la lucha »

4Batallón Único de Inteligencia y Contrainteligencia,